Âgé de 82 ans, le philosophe allemand Jürgen Habermas a quitté sa table de travail pour défendre «le projet européen qui ne peut plus rester l’affaire d’une élite ».
Parmi ses propos avisés, il affirme que la crise actuelle de l’Europe « voit le télescopage d’impératifs fonctionnels et systémiques » faisant ainsi référence aux dettes des Etats et à la pression des marchés.
Mais il fustige aussi « les partis politiques [et] nos dirigeants [qui] ne sont plus capables de se fixer d’autre objectif que leur prochaine réélection, et ce depuis longtemps, ils ne proposent plus rien, ils n’ont plus aucune conviction ». Leur «écartement des idéaux européens» est ainsi la cause principale du péril encouru par le projet européen.
Habermas à propos « De l’état de l’Europe »
Que propose donc Habermas comme suite à donner à la démocratie et au capitalisme ?
La réponse est donnée dans son dernier ouvrage sous la forme d’un essai qui s’intitule "Zur Verfassung Europas" [« De l’état de l’Europe » en français qui sera traduit bientôt chez Gallimard]. Habermas y dénonce une confiscation du pouvoir qui n’est plus entre les mains des peuples mais désormais aux mains d’instances à la légitimité douteuse comme le Conseil européen. Pour Habermas, les peuples européens ont été « victimes, il y a maintenant longtemps, d’un putsch silencieux des technocrates».
Pour autant, Jürgen Habermas demeure un optimiste opiniâtre qui «croit dur comme fer à la raison populaire. A la démocratie à l’ancienne, bien ordonnée. A une opinion publique qui sert à faire évoluer les choses.»
Habermas dit avoir pris conscience d’un recul de la démocratie en Europe après 2008 et dénonce «les élites politiques [qui] n’ont absolument aucun intérêt à expliquer à la population que des décisions importantes sont prises à Strasbourg. Ils n’ont peur que d’une chose, c’est de perdre leur pouvoir".
Dès lors, de son point de vue, il revient aux citoyens d’Europe de «faire valoir leur influence démocratique sur des gouvernements qui opèrent aujourd’hui dans une zone floue d’un point de vue constitutionnel». En effet, «l’Union n’est pas une fédération d’Etats, ni un Etat fédéral, mais quelque chose de nouveau, une communauté juridique dont ont convenu les peuples d’Europe avec les citoyens d’Europe, c’est-à-dire dont nous avons convenu entre nous, en excluant nos gouvernements respectifs. Ce qui prive naturellement Angela Merkel et Nicolas Sarkozy du fondement de leur pouvoir, mais c’est aussi là son objectif».
L’autre option pour Habermas réside dans «les médias [qui] devraient aider les citoyens à comprendre quel est l’impact de l’Union sur leur vie. Les politiques verraient à quelle pression ils seront soumis si l’Europe échoue. Il faut donc démocratiser l’Union, mais concrètement, comment ?» Là, Habermas ne répond pas précisément. Sans doute, la crise de la zone euro rend-elle de ce point de vue nécessaire une plus grande intégration politique de l’UE. Une seule certitude pour Habermas, il faut «DAVANTAGE D’EUROPE » ! Et cela passe par « une institutionnalisation incontestable des décisions communes ». Pour ce faire, les politiciens devraient « mettre enfin les cartes européennes sur table afin d'éclairer de manière offensive la population européenne sur la relation entre les coûts à court terme et l'utilité véritable, c'est-à-dire sur la signification historique du projet européen. »
Que peut faire l’Union Européenne : Laisser le temps au temps ?
On peut relever d’emblée que l’Union Européenne (UE) n’a pas la compétence nécessaire pour harmoniser les économies nationales tout simplement parce que l’UE est une union d’États souverains démocratiques.
Par ailleurs, a-t-on jamais demandé aux citoyens de l’Union Européenne s’ils voulaient devenir des Européens ? Comment prétendre parler d’Europe sans demander aux citoyens des États-membres de l’UE leur volonté d’adhésion à une identité européenne ?
Dans ces conditions, "renforcer" les institutions antidémocratiques de l'UE relève de l’imposture idéologique.
Enfin, la plupart des problèmes structurels auxquels est confrontée l'Union Européenne aujourd'hui proviennent de l'imposition des ambitions capitalistes dans la zone euro alors que la fertilisation naturelle vers un multiculturalisme européen et mondial pourrait avancer de manière positive et à un rythme progressif. Tout se développe pour être plus fort et plus cohérent quand on le laisse faire à un rythme naturel. Cela se reflète dans la différence de perception des générations quant aux attitudes envers l'homogénéité européenne. Bruxelles veut le vin avant que les raisins ne soient pressés.
Mettre en œuvre l’utopie européenne nous demande plus de responsabilité et de démontrer par des faits qu’une nouvelle ère de l’humanité est possible dans tous les secteurs de la société. Les peuples de l’UE doivent s’inspirer de leur histoire et de leurs valeurs partagées pour fonder une société européenne. Du lien social européen naîtra alors un projet politique européen fondateur d’une nouvelle union avec des institutions pérennes et harmonieuses.
Habermas : Paroles de ‟Kéké” européaniste
Habermas « tape du poing sur la table » fait le « kéké » «en s’écriant : Cela suffit, maintenant ! » car « (…) c’est trop important. Il faut que tout le monde comprenne bien que nous avons des décisions très importantes à prendre. C’est la raison pour laquelle je me suis engagé dans le débat (…)».
Pour affronter la pression des marchés financiers, l'UE doit obtenir «les compétences politiques de guidage qui sont nécessaires pour garantir au moins dans le cœur de l'Europe, c'est-à-dire parmi les membres de la zone monétaire européenne, une convergence des développements économiques et sociaux».
Pour bâtir «la première communauté supranationale démocratiquement légalisée» que Habermas appelle de ses vœux, il faut avoir en ligne de mire qu’«une intégration politique appuyée sur le bien-être social est nécessaire pour que la pluralité nationale et la richesse culturelle du biotope de la "vieille Europe" puissent être protégées du nivellement au sein d'une globalisation à progression tendue».
Anne-Marie Champoussin
Les peuples européens égoïstes ? :
RépondreSupprimer« La solidité financière des Etats-membres doit pouvoir être imposée de force par la communauté monétaire. [...] Imposer une discipline budgétaire va donc nécessairement de pair avec une limitation de la politique nationale ». Le blogueur Pierre Levy réagit aux propos «audacieux» du banquier allemand Joseph Ackermann.
Source : http://www.marianne2.fr/Les-peuples-europeens-egoistes_a213308.html
Debtocracy International Version : For the first time in Greece a documentary produced by the audience. “Debtocracy” seeks the causes of the debt crisis and proposes solutions, hidden by the government and the corporate media.
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